Quantcast
Channel: Bibliothèque Dauphinoise
Viewing all 169 articles
Browse latest View live

Essai sur l'origine et la formation des Dialectes vulgaires du Dauphiné, de Jules Ollivier, 1836

$
0
0
Au moment même où se mettait peu à peu en place un système éducatif qui tendait à promouvoir l'usage exclusif du français au sein de la population, les érudits locaux s'intéressaient alors aux "patois" régionaux. Pour le Dauphiné, le premier ouvrage exclusivement consacré à ce sujet est celui de Jacques-Joseph Champollion-Figeac, paru en 1809 : Nouvelles recherches sur les patois ou idiomes vulgaires de la France et en particulier sur ceux du département de l'Isère. Cependant, il ne concernait que l'Isère.

Il faut attendre les années 1830 pour que deux érudits aussi jeunes qu'enthousiastes publient chacun de leur côté des ouvrages qui allaient ouvrir la voie à l'étude des parles régionaux du Dauphiné. Le premier est Paul Colomb de Batines, un gapençais qui utilise l'argent que lui donnait son père pour ses études de droit, pour publier la première Bibliographie des patois du Dauphiné.


Presque au même moment, un autre érudit, aussi juriste de formation, Jules Ollivier, publie un Essai sur l’origine et la formation des dialectes vulgaires du Dauphiné, en 1836.



C'est réellement le premier essai sur les langues régionales du Dauphiné (Drôme, Isère, Hautes-Alpes). En effet, celui de Jacques-Joseph Champollion-Figeac ne concernait que l'Isère, ce qui écartait de fait toutes les langues de la zone provençale. Jules Ollivier lui fera cependant de nombreux emprunts.

Ensuite, Jules Ollivier et Paul Colomb de Batines collaboreront. Ils publieront ensemble une nouvelle version de leurs travaux dans les Mélanges biographiques et bibliographiques relatifs à l'histoire littéraire du Dauphiné. De cette réunion des deux textes, il a été fait un tirage à part de 24 exemplaires : Essai sur l'origine et la formation des Dialectes vulgaires du Dauphiné, suivi d'une Bibliographie des Patois du Dauphiné, Valence, Borel, 1838, grand in-8°, VI-95 pp.

A ce titre, ils font œuvre de pionniers, même si le résultat n'est probablement pas à la hauteur des attentes. Dans son Essai, Jules Ollivier n'identifie par la différence entre le provençal et le franco-provençal qui sont les deux langues que se partage le Dauphiné. C'est pourtant un trait majeur de la linguistique dauphinoise. Quelques années plus tard, l'abbé Moutiers, autre grand spécialiste des langues dauphinoises, se montre sévère : "Jules Ollivier et Colomb de Batines publièrent un aperçu général sur l'origine et la formation des dialectes vulgaires du Dauphiné. Malheureusement l'importance de cette nouvelle publication ne répond que d'une manière imparfaite à l'ampleur de son titre. Elle se perd dans des généralités ne pouvant descendre dans le détail des faits précis faute de matériaux. Le premier essai bibliographique patoise, pour notre province, remonte à cette époque."

Pour plus d'informations sur :
- Essai sur l'origine et la formation des Dialectes vulgaires du Dauphiné : cliquez-ici.
- Bibliographie des patois du Dauphiné : cliquez-ici.


Correspondance

En répertoriant un ensemble de plaquettes, j'ai trouvé une de ces correspondances comme je les aime. Vous allez voir ce que j'appelle une correspondance

La plaquette en question est :
Pouillés de 1516 ou Rôles des décimes des diocèses de Gap et d'Embrun, publiés d'après le Ms. Latin 12.730 de la Bibliothèque nationale., par l'abbé Paul Guillaume
Gap, Imprimerie Jouglard père et fils, 1888.
Comme on le voit le faux titre porte un envoi :
"Au cher "Concelié dou Féliblige". Petit souvenir d'un mauvais accueil fait à Gap le 18 août 1888. P. G." Il s'agit d'un envoi de Paul Guillaume à Victor Lieutaud (1844-1926), érudit, majoral du Félibrige, bibliothécaire à Marseille, puis notaire à Volonne.

Or quelques mois plus tard, l'abbé Paul Guillaume fait paraître des Observations et corrections sur son ouvrage, dans le Bulletin de la Société d'Etudes des Hautes-Alpes, 1888. A la page 330 :

il y a cette précision :

C'est ce que j'appelle un correspondance. Cette petite notation d'une rencontre à Gap le 18 août 1888 se trouve concrétiser par un envoi sur l'ouvrage en question dans cette note. Cela donne comme un épaisseur humaine à une simple note ou un simple envoi. C'est une petite chose, mais cela donne de l'humanité à cet ouvrage lorsqu'on imagine l'abbé Paul Guillaume donnant cette plaquette à son ami, lui rédigeant un envoi puis rappelant cette rencontre quelques mois plus tard en note d'un de ses articles. L'article et l'envoi se trouvent maintenant réunis par le hasard dans ma bibliothèque.

Un achat particulier (pour moi) à Drouot : les Transactions du Briançonnais, de 1645.

$
0
0
Acheteur régulier, je reçois des catalogues de ventes aux enchères. Il y a deux ou trois semaines, j'ai reçu le catalogue d'une vente de livres anciens assez généraliste, opérée par la SVV Ader Nordmann, le 13 mars 2012 (expert : Eric Busser).


Je feuillette le catalogue et mon regard est arrêté par un ouvrage qui a tout pour m'intéresser :  Les Transactions d'Imbert, Dauphin de Viennois, Prince du Briançonnais, etc.


Je lis la notice de l'ouvrage (lot n° 56) et, belle et flatteuse surprise, je reconnais ma prose et vois mon nom, comme référence :


L'expert de la vente s'est référé à la notice que j'ai consacrée à l'édition de 1641 de cet ouvrage (pour plus de détails, cliquez-ici), qui avait aussi fait l'objet d'un message sur ce blog :  Deux impressions anciennes de la charte de franchise du Briançonnais, en 1641 et 1788.

La vente proposait l'édition de 1645 que je n'avais pas. Je n'ai pas hésité longtemps pour participer. Après une courte et peu disputée enchère, j'ai acquis cet ouvrage, qui vient utilement compléter ma bibliothèque qui comprenait déjà les éditions de 1641 et 1788 de cette Charte de Franchise du Briançonnais. 



Je lui ai consacré une page (cliquez-ici). On y retrouve les mêmes textes que dans l'édition de 1641, ensemble de textes qui ont pour but de justifier les droites et privilèges du Briançonnais. Au delà de la reprise de ces documents, cette édition se justifie surtout par la publication de la confirmation des privilèges du Briançonnais par le tout nouveau roi de France, Louis XIV (confirmation datée de février 1644). Saine prudence de nos ancêtres qui, à chaque nouveau roi, veillaient à faire reconnaître les droits chèrement acquis de la principauté. Prudence d'autant plus nécessaire que Louis XIV, dans le cadre de sa politique absolutiste, tentera peu à peu de rogner les privilèges des provinces au profit du centralisme royal. Il faudra attendre la Révolution pour parachever le travail de centralisation et d'égalitarisme qu'avait entrepris la royauté, sans toujours se donner les moyens d'y arriver (pour ceux que l'idée d'une continuité entre l'Ancien Régime et la Révolution ne rebute pas, je vous conseille la lecture d'un livre trop (volontairement ?) méconnu d'Alexis de Tocqueville : L'Ancien Régime et la Révolution).

J'avoue avoir trouvé un secret plaisir à acquérir cet ouvrage dont la notice faisait explicitement référence à mon travail de publication de bibliographie dauphinoise sur Internet.  J'ai eu l'impression de boucler une boucle en l'intégrant à ma bibliothèque.

La description de cet ouvrage m'a aussi offert un de ses petits plaisirs que j'affectionne. La page de titre comporte deux ex-libris manuscrits. Le premier que l'on voit bien au centre, encadrant les armoiries, et le second, en bas à droite (on ne le voit pas sur l'image ci-dessus), qui été effacé par mouillage :


Je me suis donné le défi d'identifier ces propriétaires. Pour ceux que cela intéresse, je peux leur expliquer comment j'y suis parvenu, mais j'ai identifié sans doute possible le premier propriétaire. Il s'agit de François Fantin (1619 (?) - après 1695), fils d'un consul de Briançon, dont la signature sur l'acte de mariage de sa fille à Briançon le 14 février 1674 est identique à celle que l'on devine encore sur la page de titre, jusqu'au "f" initiale si caractéristique.


La signature en dessous est celle de sa femme Marguerite Estienne.

Dans ce même acte de mariage, les titres et fonctions de François Fantin sont donnés :


Transcription (en orthographe modernisée) : François Fantin, docteur en droits, avocat au parlement, juge ordinaire des mandements de Bardonnèche et de Névache, garde du petit scel (sceau) de la ville et bailliage de Briançon.
On comprend qu'avec de telles fonctions, il ait eu besoin de posséder un des documents juridiques majeurs du Briançonnais.  C'était presque un outil de travail pour lui.

Pour l'identification de la deuxième signature, c'est plus hypothètique, mais il s'agit peut-être de son petit-fils. Ce qui est sûr est qu'il s'agit d'un docteur en droit, comme l'indique les trois lettre "J. V. D." qu'il a ajoutées en dessous de sa signature : 

C'est l'abréviation de Juris Utriusque Doctor: "Docteur en l'un et l'autre droits", autrement dit en droit canon et en droit civil.

Deux dessins de l'Oisans

$
0
0
Aujourd'hui, petite trêve dans la bibliophilie dauphinoise, pour parler de deux dessins récemment acquis. Trouvés sur un célèbre site d'enchères en ligne, pour un prix à la limite du dérisoire, ils représentent deux vues de l'Oisans. Comme je l'ai déjà expliqué ici, les dessins, peintures, gravures, etc. représentant cette région des Alpes sont rares jusqu'au milieu du XIXe siècle. Cela donne d'autant plus d'intérêt à ces deux dessins au crayon. De bonne facture, ils sont signés d'un simple "N" et datés de 1859.

Le premier est un paysage de l'Oisans, croqué soit depuis la plaine de Bourg d'Oisans, soit depuis la vallée de l'Eau d'Olle (il faut que j'y retourne, dessin en main, pour parfaire l'identification, autrement dit, il est temps d'y aller en vacances).



Le deuxième représente la voie romaine de l'Oisans. Je n'ai pas complétement identifié le lieu, mais il doit s'agir du début de la vallée de la Romanche, dans la partie que l'on appelle l'Infernet. Il existe encore des vestiges de la voie romaine, en particulier la porte de Bons.




Théâtre religieux en Briançonnais au début du XVIe siècle

$
0
0
Dans les premières années du XVIesiècle, le Briançonnais vit une floraison de représentations de vies des saints, généralement appelées des mystères. Ces représentations théâtrales, interprétés par les habitants mêmes des paroisses, étaient dont écrites en provençal haut-alpin, pour les rendre compréhensible par tous, et étaient transposées à l'époque contemporaine, pour leur donner un caractère plus pédagogique et édifiant. Ces représentations ont fait l'objet de copies contemporaines qui ont été longtemps conservées dans les archives des communes ou des paroisses. Découverts à la fin du XIXesiècle par les archivistes des Hautes-Alpes ou les curés des lieux (M. Bing, abbé Paul Gauillaume, abbé J. Fazy), ces mystères ont fait l'objet  de publications savantes, essentiellement sous les auspices de la Société d'Etudes des Hautes-Alpes. Ce sont des témoignages rares et inestimables du parler de ces régions et, de façon plus indirecte, des témoins des mentalités des Hauts-Dauphinois en ce début de XVIe siècle, quelques années avant l'apparition de la Réforme.

J'ai donc peu à peu rassemblé dans ma bibliothèque ces publications savantes, qui sont autant de témoin d'une très active vie religieuse locale et, chose plus rare, des témoins du parler local. La liste des mystères publiés, par ordre de représentation ou de copie, est :
- Histoire de saint Antoine, 1503.
- Moralité de saint Eustache, 1504.
- Histoire de saint Pierre et saint Paul.
- Histoire de saint Pons.
- Passion de saint André, 1512.
- Histoire de la translation de saint Martin.
- Histoire de saint Barthélémy.

A cette liste de mystères, provenant tous du Briançonnais, on peut ajouter ce dernier texte, provenant de l'Embrunais. Il s'en distingue par le dialecte utilisé (Embrunais, au lieu de Briançonnais), mais aussi par le sujet. Tous les mystères du Briançonnais correspondent à des vies des saints, alors que celui-ci se rapporte à un épisode de la vie du Christ; extrait des Evangiles :
- Les Rameaux : 1531

Les différents exemplaires que je possède sont :

Le mystère de Sant Anthoni de Viennès publié d'après une copie de l'an 1503 et sous les auspices de la Société d'Etudes des Hautes-Alpes, par l'abbé Paul Guillaume
Gap et Paris, 1884


Mystère en provençal briançonnais de 1503, découvert en 1881 par l'abbé Guillaume dans les archives de Névache (Hautes-Alpes). Le texte du mystère fait 3965 vers. 
C'est la publication qui contient le plus de documents annexes.
Critiqué sur la méthode de publication de ce texte, l'abbé Guillaume précise que cet ouvrage "est moins une œuvre d'érudition qu'une œuvre de vulgarisation".
Jacques Chocheyras (voir ci-dessous) consacre une longue notice à ce mystère, qu'il considère comme l'un des plus intéressants. Au terme de son analyse, il conclut que l'original a été composé dans un établissement antonin de la vallée de la Durance, puis est arrivé dans le Briançonnais par un moine itinérant qui remontait la vallée. Le texte aurait été adapté à Briançon. Il aurait aussi eu une visée missionnaire à l'époque même où les Franciscains tentaient de purger les hautes vallées de l'hérésie vaudoise.

Le mystère de saint Eustache joué en 1504 sous la direction de B. Chancel, Chapelain du Puy-Saint-André, près Briançon (Hautes-Alpes) et publié par l'abbé Paul Guillaume
Gap et Paris, 1883

Le mystère de saint Eustache a été découvert par l'abbé Fazy en juin 1878 dans les archives de Puy-Saint-André et a été publié par l'abbé Guillaume dans la Revue des langues romanes C'est le seul des mystères qui a fait l'objet d'une traduction en français.

Istoria Petri & Pauli. Mystère en langue provençale du XVe siècle publié d'après le manuscrit original, sous les auspices de la Société d'Etudes des Hautes-Alpes par l'abbé Paul Guillaume 
Gap et Paris, 1887

 Le mystère de saint Pierre et saint Paul a été découvert en 1865 par M. Bing, archiviste des Hautes-Alpes, dans les archives de Puy-Saint-Pierre, avec le mystère de Saint-Pons.


Mystère de Saint-André, par Marcellin Richard, 1512. Publié avec une introduction, une nomenclature des documents en langue vulgaire connus dans les Hautes-Alpes, et un petit glossaire par l'abbé J. Fazy
Aix, 1883


Le mystère de saint André a été découvert par l'abbé Fazy en 1878 dans les archives de Puy-Saint-André, avec celui de saint Eustache. Il semble y avoir eu une sourde lutte entre les abbés Fazy et Guillaume autour de la publication de ces mystères. Cela donna ensuite lieu à un échange polémique.


Les Rameaux.Mystère du XVIe siècle en dialecte embrunais, publié avec une introduction et des notes par Louis Royer et suivi d'une esquisse philologique et d'un glossaire par A. Duraffour. 
Gap, 1928 

Mystère en provençal haut-alpin (Embrunais). Il met en scène l'épisode de l'arrivée du Christ à Jérusalem et le repas chez Simon une semaine avant Pâques (les Rameaux), en situant l'action à l'époque de la rédaction du mystère. Cela nous offre des scènes de la vie quotidienne de cette époque. Rédigé par le carme Decressent en 1529 et copié en 1531 par un certain Faure, il n'a jamais été joué, à cause de la médiocrité de sa rédaction et de son style : Factura nihil valet. C'est cependant un témoignage sur le parler embrunais au début du XVIe siècle et sur l'expression de la vie dans l'Embrunais à cette époque.


Pour voir une description détaillée de ces ouvrage, cliquez-ici.
On peut aussi consulter une page Wikpiédia qui leur est consacrée : Mystère briançonnais.

L'ouvrage récent de référence est l'étude de Jacques Chocheyras :
Le théâtre religieux en Dauphiné du Moyen Age au XVIIIe siècle (Domaine français et provençal). 
Genève, Librairie Droz, 1975.

C'est une étude qui porte sur trois secteurs de l'ancien Dauphiné : Grenoble et le Bas-Dauphiné, la vallée de la Doire en amont du Pas de Suse et le Haut-Dauphiné, avec le Briançonnais et l'Embrunais. Pour ce dernier secteur, il analyse tous les mystères haut-alpins en langue provençale : origine, histoire, langue, etc., suivi d'une description analytique du contenu. L'auteur s'attache à déterminer la filiation de tous ces mystères depuis des originaux de la Basse Provence. La Section II. Haut-Dauphiné.(pp.65-116), étudie plus particulièrement les Mystères du Briançonnais. Le sous-titre de cette section est, en soi, un résumé de la thèse de l'auteur : Les arrangeurs des campagnes : les Mystères en provençal du Briançonnais représentés au début du XVIe siècle. Elle contient un historique de tous les mystères cités ci-dessus. En annexe, l'auteur donne une analyse critiques de ces mystères (pp.165-197). La bibliographie reprend les éditions princeps de ces textes (pp. 299-300) et une recension des comptes-rendus correspondants (pp. 306-307). Dans sa conclusion, l'auteur s'attache à démontrer que tous ces mystères sont des transcriptions en provençal haut-alpin de textes élaborés en Haute-Provence. Ils auraient suivi la voie des pèlerins et des artistes en route pour l'Italie par le col du Montgenèvre. Ils auraient aussi servi de contre-propagande à l'encontre des Vaudois qui habitaient ces hautes vallées, dont les croyances réfutaient l'existence des saints. C'est ainsi qu'il répond à la question qu'il posait en introduction : "comment s'explique la représentation de ces mystères en ce lieu et à cette époque ?" En effet, la concentration de ces mystères sur une durée aussi courte et sur un territoire aussi restreint est un phénomène unique. J. Chocheyras fait aussi un parallèle entre ces mystères et la multiplication des peintures murales dans les églises et chapelles rurales. A la différence de l'abbé Paul Guillaume, il ne fait pas un lien direct, mais conçoit les deux démarches comme la manifestation d'un même phénomène. 


Comme souvent pour ce type d'ouvrages d'érudition, on les trouve soit sous forme brochée, soit dans des reliures modestes. Le mystère de Sant Anthoni de Viennès est recouvert d'une demi basane rouge. 


Un ensemble de 5 ouvrages (mystères et publication associée) a été relié par Sicard, à Digne, 1936, pour Elzéar Lieutaud (Volonne 1881 - Laragne 1947), juge de paix à Laragne. Il était le fils du félibrige Victor Lieutaud (1844-1926). 


C'est une reliure solide en basane marron. 

Pour finir, ces publications ont donné lieu à des échanges polémiques entre l'abbé Guillaume, archiviste des Hautes-Alpes, Joseph Roman, avocat et érudit local, mais aussi avec l'abbé J. Fazy, simple curé qui se hasardait dans la carrières de l'érudition locale. Cela donna lieu à la publication de multiples plaquettes qui sont un bon témoignage de l'âpreté des luttes entre érudits locaux, pour acquérir la prééminence au sein de l'historiographie des Hautes-Alpes. 

Trouvailles dauphinoises au salon du livre ancien du Grand-Palais

$
0
0
C'est devenu un rituel. Comme toutes les années, je suis allé au salon du livre ancien du Grand Palais, exceptionnelle réunion d'ouvrages anciens, où l'on peut voir quelques uns des plus beaux livres actuellement en vente sur le marché.Ces deux amis blogeurs ont fait leurs comptes-rendus (voir ici et ). 

Chez le même libraire, j'ai déniché  deux ouvrages qui sont venus rejoindre ma bibliothèque. Le premier est un bel exemplaire d'un recueil de 8 lithographies en camaïeu qui illustrent un album sur la Salette. Pour ceux qui l'ignorent (et ils sont sûrement peu nombreux), la Vierge est apparue à deux enfants en 1846 à la Salette, un petit village au dessus de Corps, entre Grenoble et Gap. C'est rapidement devenu un lieu de pèlerinage et donc l'objet de nombreux guides.

Adolphe Maugendre (1809-1895), célèbre illustrateur et lithographe normand, publia ce recueil avec le libraire Merle de Grenoble en 1863 :
La Salette. Album composé de 8 vues dessinées d'après nature et lithographiées par A. Maugendre, accompagné d'un texte descriptif par Mr. l'abbé ***

La plus célèbre des lithographies est cette représentation de la place Grenette à Grenoble. C'était (et c'est encore) une des places centrales de la ville, une des plus animées. C'étaient de là que partaient les diligences, dont celles qui desservaient la Salette.


Pour les stendhaliens, l'immeuble qui occupe le fond de la place à gauche abritait l'appartement du grand-père de Stendhal, le bien aimé docteur Gagnon.Il en parle abondamment dans la Vie de Henry Brulard. J'aime beaucoup ces lithographies vivantes, avec ces petites scènes de genre : le départ de la diligence, les promeneurs, le militaire, le charretier, le gamin badaud, etc. J'y suis d'autant plus sensible qu'à cette époque-là, mes ancêtres ardéchois (eh oui !, j'ai des ancêtres ardéchois) vivaient dans la petite rue qui part au fond à gauche, près de la voûte qui donne accès au jardin de la ville. C'est peut-être mon ancêtre, qui était commissionnaire en peaux pour la ganterie grenobloise, que l'on voit sur la place !

Autre lithographie, cette vue de Corps :


et du lieu de l’apparition :


L'ouvrage se présente sous un cartonnage (légèrement sali, alors que l'intérieur est très frais) :


La page de titre est aussi une lithographie :



(remarque : malheureusement, les scans des lithographies ne rendent pas les nuances des couleurs).

L'autre achat est une de ces petites études d'érudition locale, publiée dans une revue savante dauphinoise et tirée à part à petit nombre (125). Il s'agit de :
Les allures et les mœurs de MM. de Maniquet et Audeyer, gentilshommes dauphinois. Contribution à l'étude de la vie domestique au XVIe et au XVIIe siècles, par Pierre Saint-Olive


 avec sa jolie couverture rose conservée :


dans sa reliure en demi-maroquin rouge à coins :


C'est l'exemplaire n° II des 25 exemplaires de tête, sur vélin à la cuve BFK.

J'en parlerai plus longuement lorsque je le décrirai. Il s'agit du récit des démêlés judiciaires au sein d'une famille de la petite noblesse locale, noblesse en cours de déclassement :
Durant quatre ou cinq ans, de 1696 à 1701, tout Grenoble et toute la vallée du Grésivaudan, de Barraux à La Tronche, s'en amusèrent. Les inculpés étaient d'un rang suffisant et nécessaire pour attirer l'attention des grands; par leurs relations de famille, ils se plaçaient au-dessus du commun; par leur vie quotidienne, ils étaient plus proches du paysan que du grand seigneur; d'où les brocards d'en haut et l'attention gouailleuse d'en bas qu'excitait le caractère tragi-comique et acharné des poursuites. Une belle-mère tente de faire assassiner son gendre : le gendre raconte « pis que pendre » de sa belle-mère : en faut-il plus pour devenir le point de mire de la malignité publique?
Pour revenir au Grand-Palais, je vous renvoie aux 4 comptes-rendus de mes visites précédentes :
Salon 2008, un compte-rendu succinct, pour un ouvrage acheté cette année-là dont j'ai parlé plus longuement ici.
Salon 2009, un compte-rendu plus complet.
Salon 2011, où je parle plus des livres que je n'ai pas achetés, et pour cause, j'étais revenu bredouille...

Message de circonstance !

$
0
0
Comme chacun sait, en cette veille de deuxième tour des présidentielles, c'est la trêve de la politique. Comme sur ce blog je ne parle jamais de politique, j'ai décidé, pour une fois, afin d'être à contre-courant, de vous présenter un petit ouvrage très politique. C'est un livre que j'ai déniché dans mes chines. Le titre est déjà un programme en soi :
Faut-il fusiller 300 000 ouvriers en France? L'abolition des castes sociales. La méthode de travail. Les Eglises laïcisées. La libre pensée. La défense dans la République.


L'ouvrage n'est pas daté, mais la préface est datée d'août 1905 et 1906 apparaît sur la couverture.

Pourquoi cet ouvrage a-t-il attiré mon attention ? Il était disponible chez Louis Manent, à Guillestre dans les Hautes-Alpes, un endroit où l'on n'imaginerait pas que pouvait se diffuser ce type de littérature. Le seul exemplaire disponible dans les bibliothèques publiques (CCFr) se trouve dans le fonds dauphinois de la Bibliothèque Municipale de Grenoble.


Au-delà de tout cela, ce livre est un peu un mystère. Même si Clovis Hugues l'a préfacé (voir la notice biographique de Clovis Hugues, une des figures du socialisme méridionale à la fin du XIXe siècle : cliquez-ici), je n'ai pas trouvé d'informations supplémentaires sur ce livre. L'auteur, dont le nom n'apparaît qu'à la fin de l'ouvrage, est Théophile Mital. Malgré mes recherches, je n'ai rien trouvé sur cette personne. Quant à Louis Manent, je fais des recherches sur les Hautes-Alpes, mais pour le moment, rien dans les ouvrages sur les Hautes-Alpes. Il faut savoir que le mouvement ouvrier était peu actif dans les Hautes-Alpes. Sauf erreur de ma part, il n'existe pas d'histoire du socialisme dans les Hautes-Alpes. A peu près à la même époque, en 1907, il y a eu une grève très dure à l'usine de la Schappe à Briançon, la plus grande usine dans les Hautes-Alpes à l'époque. Ces deux images extraites d'un article dans le Bulletin de la Société des Hautes-Alpes de 2003 illustrent ce mouvement social :



Pour finir, la petite phrase au pied de la couverture est tout un programme en ces périodes ! :
Si, dans l'accord parfait, l'intelligence de tous les hommes agissait méthodiquement, l'Humanité pourrait atteindre au bonheur.
Complément

Depuis la publication de ce message, j'ai fait quelques recherches dans les recensements et l'état civil des Hautes-Alpes. Je pense en savoir plus sur Louis Manent.

En 1906 à Guillestre, vivaient trois membre de la famille Manent :
- Léon Manent, âgé de 34 ans, célibataire, instituteur, logé au Groupe scolaire de Guillestre.
- François Fié, 34 ans, aussi instituteur et sa femme Louise Manent, sœur du précédent. Leur mère Rosalie Illy, veuve Manent, vivait avec eux. Ils vivent aussi au Groupe scolaire.
- Louis Manent, 24 ans, carrossier, qui vit seul au Barry, un quartier de Guillestre.
Il est probable que ce Louis Manent est celui chez qui on peut trouver cet ouvrage.

D'autres recherches montrent que cette famille est originaire de Saint-Genis, dans le sud des Hautes-Alpes. Les parents Léon Manent et Rosalie Illy se sont mariés en 1870. Ils étaient cultivateurs. Apparemment, ils ne pouvaient pas en vivre et on les retrouve dès 1875 à Montéglin où lui travaille sur le chantier du chemin de fer des Hautes-Alpes, comme poseur de rails, et elle comme garde-barrière. Visiblement, ils suivent l'avancée de la construction du chemin de fer, car ils habitent quelques temps à La Freissinouse, près de Gap, puis on les retrouve à Guillestre. C'est donc un milieu de cultivateurs prolétarisés, qui réussissent tout de même à ce que deux de leurs enfants, Léon et Louise, accèdent à un statut supérieur comme instituteurs.

Ces informations apportent quelques éléments sur le milieu où se trouvait ce livre, mais laissent beaucoup de question en suspens. Qui a véritablement écrit ces pages ? Comment un carrossier a pu se trouver le diffuseur d'un tel ouvrage dans les Hautes-Alpes ? J'émets l'hypothèse que Théophile Mital n'existe pas, mais que ce n'est qu'un pseudonyme pour Léon Manent l'instituteur. Pourquoi ne serait-ce pas Louis Manent lui-même ? A la lecture du texte, on n'imagine pas un homme de 24 ans écrire ces pages. La culture d'un instituteur était sûrement indispensable. Probablement pour se protéger comme fonctionnaire, Léon Manent a préféré laisser son frère, artisan, mettre son nom sur cet ouvrage. Tout cela n'est que conjectures...

Pour finir, j'ai trouvé quelques infos sur Internet :
- La référence d'une lettre de Louis Manent, annonçant ce livre,dans La dépêche des Alpes, du 5 & 18 août 1906 (cliquez-ici).
- une page consacrée à l'imprimerie communiste d'où est sorti cet ouvrage : L'Emancipatrice (cliquez-ici et cliquez-là).

Quelques "petites" trouvailles...

$
0
0
Après ce salon du livre ancien du Grand Palais, occasion de voir et découvrir plein de beaux et rares livres, on peut reposer les yeux (et le portefeuille) sur ces petites trouvailles qui font souvent mon bonheur.

La première est un lot de 6 cartes de la Routes des Alpes, cette route touristique à travers les Alpes depuis Nice jusqu'au Léman. On ne compte pas le nombre de livres, brochures, dépliants, cartes qui ont été édités sur cette route, souvent sous l'égide de la compagnie P.L.M. (à vérifier, mais c'est peut-être cette compagnie qui a été à l'initiative de ce parcours touristique en voiture qui permet de découvrir toutes les Alpes françaises de l'intérieur).

Les 6 cartes qui illustrent les 6 étapes de la route se présentent pliées, recouvertes d'une chemise en carton oblongue illustrée au recto et au verso de dessins des paysages traversés. Le choix des paysages est des plus classiques. Ce n'est pas cela qui en fait le charme. C'est tout simplement le style, très années 40 (mais si quelqu'un sait être plus précis sur le style, je suis preneur). Plutôt que de tenter de décrite le style, je préfère vous faire découvrir quelques-uns de ces dessins :

 La Meije

 Château-Queyras

 Briançon, la Grande Gargouille

Le château de Vizille

La Grande-Chartreuse

L'Aiguille Verte et les Drus

La deuxième trouvaille est une édition du Guide-Joanne de 1910 sur le Dauphiné où un certain R. Richard, du Groupement de Haute-Montagne (G.H.M) du Club Alpin Français, a dessiné une belle vue de la face sud de la Meije sur la page de garde. C'est tout simple, mais ça me plaît !


Guide-Joanne, Dauphiné, couverture.

Guide-Joanne, Dauphiné, page de titre.

Détail du dessin de la face sud de la Meije.

Quelques œuvres de Joannès Drevet et Joanny Drevet

$
0
0
Ce jeudi, une étude lyonnaise dispersait un riche ensemble des illustrateurs Joannès Drevet et Joanny Drevet, son fils. Parmi les 99 lots, on trouvait évidemment beaucoup d'ouvrages illustrés par l'un ou par l'autre, mais aussi de nombreuses gravures et, surtout pour Joannès Drevet, de nombreuses aquarelles. Des vacances opportunes m'ont permis de me rendre à la vente et de faire quelques acquisitions.

Commençons par Joannès Drevet. Né à Lyon en 1854, il y est mort en 1940. Il a très largement représenté sa ville natale, en particulier dans ce monument qu'est Le Lyon de nos pères, d'Emmanuel Vingtrinier. J'imagine que tous les amoureux de Lyon cherchent à posséder cet ouvrage, malgré le côté souvent très sombre des illustrations de Joannès Drevet. Mais il est une autre facette du personnage, celle de l'aquarelliste qui a peint de nombreux paysage du Lyonnais, du Dauphiné et des Alpes. Cette facette est plus lumineuse et plus joyeuse que celle du graveur. Le style des trois aquarelles de lui que je viens d’acquérir à cette vente nous le prouvera.

La première, la plus belle à mon goût malgré l'apparente banalité du sujet, est celle-ci :


Elle représente la vallée de la Guisane, depuis la route du Lautaret, en descendant vers Briançon. Lorsque je parle de banalité du sujet, je veux simplement faire remarquer que cette aquarelle s'abstient de tout pittoresque ou spectaculaire. Aucune montagne identifiable, aucun lieu connu, aucune présence humaine, mais une simple vue de la vallée avec la route sur la gauche et le ciel (le bleu du ciel briançonnais !) au fond. Mais quel jeu et quelle harmonie de couleurs !

Les deux suivantes sont des paysages non identifiés. La première ne m'évoque rien, peut-être le Champsaur, mais on m'a parlé de Val d'Isère. La seconde me semble clairement dauphinoise, voir haut-alpine, tant par la forme du clocher (avec les 4 petites flèches dans les angles de la base qui porte la flèche principale), que par le style des maisons. Si un lecteur reconnaît un de ces paysages, je suis intéressé.



Avant de passer au fils, je rappelle seulement que j'avais présenté il y a quelques temps une petite plaquette en hommage à Joannès Drevet où étaient mises en valeur sa peinture et ses aquarelles qui reprennent beaucoup de souvenirs de ses séjours en Savoie, Dauphiné, Hautes-Alpes. L'aquarelle de couverture représente Pont-du Fossé dans les Hautes-Alpes :



Son fils Joanny Drevet (1889-1969) a laissé une œuvre gravée extrêmement importante, en particulier sur la Savoie et le Dauphiné. C'est ainsi que j'ai pu enrichir ma collection de trois gravures :

Ancien Chalet Bonnabel au Lautaret
C'est une vue du col du Lautaret avec le massif de la Meije dans le fond.

Les Ecrins et le Hameau des Etages
C'est une vue prise dans la vallée de la Bérarde.

La Romanche
C'est une vue prise sur la route du Lautaret en montant depuis Bourg d'Oisans (ou Grenoble). On se trouve dans la gorge de Malaval.

En dehors de cet ensemble Drevet, la vente offrait quelques ouvrages intéressants sur le Dauphiné et la Savoie. Je n'ai pas été aussi chanceux (ou assez dépensier) pour ramener quelques ouvrages pour ma bibliothèque, à une exception dont je parlerai dans un prochain message.


Quand me bressavoun, par Auguste Thouard, 1910

$
0
0
Au moment même où le français prenait de plus en plus d'importance face aux langues régionales (la Révolution française a marqué un tournant dans la généralisation du français), quelques amis autour de Frédéric Mistral et Joseph Roumanille fondaient le Félibrige, mouvement de défense et d'illustration de la langue d'oc. La naissance officielle a eu lieu au château de Font-Ségugne (Châteauneuf-de-Gadagne, Vaucluse), le 21 mai 1854, jour de la sainte Estelle.

Le jour où Frédéric Mistral terminait son poème Mirèio (Mireille), véritable manifeste de la poésie provençale, le 2 février 1859, naissait à Embrun Auguste Thouard, fils d'un maçon et d'une mercière. Comme d'autres, il allait apporter sa contribution au développement du Félibrige dans les Hautes-Alpes, département qui, rappelons-le, appartient totalement à l'aire du provençal.


Le mouvement de renaissance et de préservation du provençal haut-alpin, et son intégration au mouvement de Félibrige, fut essentiellement l’œuvre de Paul Guillaume. Il réussit à ce que le congrès du Félibrige ait lieu à Gap en 1886.

Devenu avoué, Auguste Thouard resta toute sa vie dans sa ville natale. Très impliqué dans la vie locale, il fut un des animateurs du syndicalisme agricole. Très éphémère maire d'Embrun, il ne persévéra pas dans la carrière politique. En 1910, il publia une vingtaine de contes, des chansons, des comptines, des proverbes, etc. en dialecte embrunais, une des variantes du provençal haut-alpin. Par cette œuvre, il contribua à fixer le parler embrunais, tout en fournissant un large vocabulaire sur la vie quotidienne.



C'est ce petit livre que je présente aujourd'hui, probablement tiré à fort peu d'exemplaires :
Quand me bressavoun. Fatorgos, Faribolos, Vieos Chansouns et Prouverbes. Dialeite de l'Embrunes.Gap, Imprimarié Jean e Peyrot, 1910, in-12, 160 pp., une planche photographique en noir et blanc (portrait) hors texte (Pour en savoir plus, cliquez-ici.)

Il est dédié à sa mère Virginie Garcier, qui fut l'inspiratrice de ce recueil ("Quand me bressavoun" peut se traduire par "Quand on me berçait"). Elle était originaire de Saint-Apollinaire, dans les Hautes-Alpes, petit village au-dessus du lac de Serre-Ponçon, proche d'Embrun. Il reprend les textes qu'elle lui disait ou chantait lorsqu'il était "pechoun".


Les 22 contes qui constituent ce recueil sont souvent des petites scènes de genre de la vie quotidienne, où l'on voit apparaître tout un petit peuple embrunais dans ses activités quotidiennes et ses distractions. Quelques-uns sont des fables morales ou grotesques, qui mettent en scène l'arrivée au Paradis. Il y a souvent le parti pris de l'expression d'une sagesse populaire. A l'occasion, l'auteur ne recule pas devant des situations ridicules ou scatologiques, mais jamais grivoises.

Ces textes ont une dimension folklorique intéressante pour une évocation de la vie traditionnelle dans l'Embrunais au milieu du XIXe siècle. Néanmoins, comme le fait très justement remarquer Arnold Van Gennep dans Les Hautes-Alpes traditionnellesà propos d'Auguste Thouard et d'autres auteurs similaires : "leur inconvénient est que ces auteurs n'ont procédé le plus souvent que par allusion, en supposant connues de tous les coutumes populaires au milieu desquelles se meuvent leurs personnages."

Auguste Thouard est mort en 1925. On le voit parmi ses amis sur une belle photo où l'on croit voir revivre tout un monde disparu de notables IIIe république. On reconnaîtra Clovis Hugues, dont j'ai déjà parlé.


Ce petit ouvrage d'Auguste Thouard étant devenu introuvable, à l'instigation du fils de l'auteur, Auguste Thouard (1895-1985), une nouvelle édition en a été donnée en 1975, reproduisant à l'identique l'édition originale, accompagnée de quelques documents supplémentaires, tous en embrunais ou provençal : un conte inédit (seul reste d'un ensemble plus vaste disparu dans l'incendie de l'imprimerie Louis-Jean à Gap), le fac-similé d'une lettre de Frédéric Mistral, un discours d'Auguste Thouard prononcé sur la tombe d'Eugène Plauchud et l'épitaphe de sa tombe. L'avant-propos rappelle que cette réédition fait suite aux vœux de nombreuses personnalités de la culture provençale (F. Mistral neveu, P. Pons, etc.)


Enfin, en 1983, une troisième édition, financée par Auguste Thouard fils, permet de mettre à disposition une traduction en français de l'œuvre d'Auguste Thouard. Dans son avant-propos, Paul Pons s'explique sur le choix de faire une traduction et sur les difficultés rencontrées. Ce travail est l'œuvre de Mme Buhr-Mottet, mais une quarantaine de mots posait problème. Une enquête auprès de locuteurs régionaux permit de lever ces dernières difficultés. Le texte d'Auguste Thouard est celui de la 2eédition. Quelques documents supplémentaires, un avant-propos de Paul Pons, Majoral du Félibrige, et une iconographie enrichie complètent cette édition.


Cette traduction est précieuse car elle permet à ceux qui, comme moi, ne connaissent par le provençal de se familiariser avec la saveur de ces contes. Il y a un conte sympathique dans lequel il met en scène son grand-père, Guillaume Garcier, né à Saint-Apollinaire en 1793 : Lou chapèu de moun païre gran (Le chapeau de mon grand-père). Dans l'édition de 1983, il est illustré de ce dessin qui ne représente probablement pas son grand-père, mais qui est représentatif de la façon de s'habiller au début du XIXe siècle dans les Hautes-Alpes.


Pour finir, l'exemplaire provient de la bibliothèque de Clément Guigues avec son ex-libris collé sur le premier contre-plat. Clément Guigues (Embrun 25 mai 1863 - 20 février 1938) est le fils de l'illustrateur Emile Guigues. Ancien receveur de l'Enregistrement, il était aussi collectionneur et bibliophile. Son ex-libris a été dessiné par son père.

Pour ceux de mes lecteurs qui, à leurs heures perdues, s'intéressent à l'immobilier de bureaux, ils pourraient faire un lien entre Atis Real Auguste Thouard et notre auteur.  C'est effectivement le fils d'Auguste Thouard, aussi prénommé Auguste, qui créa cette activité avec ses frères.

Sur Auguste Thouard (le père !), cliquez-ici.

Miscellanées haut-alpines

$
0
0
Il y a presque 3 ans, je vous présentais un travail intéressant d'André Chalandon sur la commune de La Salle les Alpes, près de Briançon, basé sur des cartes postales anciennes (cliquez-ici).

Il vient de publier un nouvel ouvrage, toujours sur la commune de La Salle les Alpes :

La Salle les Alpes. Gens et patrimoine.

L'approche est différente car André Chalandon s'intéresse surtout au patrimoine, tant au niveau des maisons, que du petit patrimoine (portes, heurtoirs, cadrans solaires, cloches, mobiliers des églises, etc). Peu ou prou, tous les aspects du patrimoine de la commune sont abordés. Il veille en particulier à agrémenter son récit d'éléments sur les familles anciennes du village.

Au-delà de l'intérêt de l'ouvrage, j'ai été intéressé par cette description d'un maison de La Chirouze, un des hameaux de la commune :


En effet, cette maison est celle de mes ancêtres. La ferronnerie qui orne l'imposte de l'une des portes fait apparaître la date de 1831 et les initiales FR (photo en haut à droite). C'est François Roux, qui a probablement restauré cette maison après l'avoir achetée en 1830.

Dans le chapitre consacré aux cadrans solaires, j'apprends ainsi que cette maison était ornée d'un cadran solaire répertorié par Raphaël Blanchard. On y voit une photo ancienne de la maison.


Raphaël Blanchard a publié un travail important, et le premier pour la région, sur le recensement et la description des cadrans solaires très nombreux dans le Briançonnais. 


Cette petite plaquette bien illustrée a paru en 1895. Elle fait encore référence, d'autant plus qu'il a vu, décrit et parfois dessiné des cadrans solaires qui ont disparu depuis. Quelques exemples de ses relevés :




Il s'est attaché à relever les nombreuses devises en français ou en latin qui ornent ces cadrans. C'est aussi lui qui a mis en lumière l'activité du peintre piémontais, Zarbula, qui a peint ou restauré de très nombreux cadrans solaires dans le Briançonnais au XIXe siècle (voir un plage qui lui est consacrée : cliquez-ici).


Pour finir, quelques souvenirs de vacances (avril et mai dans les Hautes-Alpes) :

 Le massif de la Meije depuis le Lautaret

Soleil couchant sur Peyre-Eyraud

Bouquetin (en cours de mue), en dessous de l'Aiguillette du Lauzet

 Chamois en montant à l'Izoard

Sabots de Venus

Une exposition au musée de l'alpinisme de Saint-Christophe-en-Oisans et autres considérations.

$
0
0
Ce week-end dernier, j'ai fait une rapide virée à Saint-Christophe-en-Oisans (Isère), au cœur du massif de l'Oisans, pour le vernissage de la dernière exposition du musée de l'alpinisme.



Cette exposition retrace l'histoire et la vie des hébergements qui se sont mis en place dans la vallée depuis l'arrivée des premiers touristes qui partaient à la découverte et à l'exploration de cette vallée de l'Oisans. Elle donne accès à quelques uns des plus grands sommets du massif des Ecrins. Essentiellement fondée sur des témoignages des habitants et des archives, cette exposition nous fait revivre les efforts de la population pour recevoir au mieux les touristes du monde entier, malgré les opinions parfois malveillantes des premiers touristes sur la médiocrité des hébergements dans le massif. Si vous avez l'occasion d'y passer, je vous conseille d'y aller et si vous ne connaissez pas le musée, c'est l'occasion de le découvrir.

J'ai modestement participé à cette exposition en fournissant quelques illustrations, en particulier des planches extraites de Outline Sketches in The High Alps of Dauphiné, de T. G. Bonney, publié à Londres en 1865.


Cet ouvrage contient quelques unes des premières vues des sommets du massif des Ecrins, comme les faces sud et nord de la Meije. Je ne me lasse pas de les reproduire (la face nord avait déjà été représentée, mais jamais avec une telle précision) :




Pour en savoir plus sur cet ouvrage, cliquez-ici.


J'en ai profité pour monter le lendemain à la tête de la Maye. Les 800 mètres de dénivelé au petit matin ont été récompensés par un des plus beaux panoramas qui existent dans les Alpes. J'aurais envie de dire le plus beau, mais on risquerait de me taxer de partialité. Dans tous les cas, c'est un des plus sauvages. J'ai pu y admirer la même face sud de la Meije, représentée par T. G. Bonney :



ainsi que l'extraordinaire face est des Ecrins, une véritable cathédrale :



On peut rapprocher cette vue de ce tableau de Contencin dont je vous avais parlé sur ce blog (cliquez-ici) :


Pour finir cette évocation, je vous rappelle ces trois pages consacrées aux trois principaux sommets du massif des Ecrins :


Considérations diverses (sans lien avec le début du message) :


Le 26 juin prochain se vendent à Toulouse quelques souvenirs du baron de Lassus (1868-1909), un alpiniste pyrénéen. J'avoue ne jamais en avoir entendu parler, mais c'est une région que je connais mal. L'article qui lui est consacré dans la dernière Gazette de Drouot affirme péremptoirement : "Bernard de Lassus a révolutionné la pratique de l'alpinisme". J'ai le sentiment que le rédacteur de l'article est le seul à partager cette opinion. Une photo, qui fait partie de la vente, illustre l'article. Est-ce de l'ironie ou de la méconnaissance de la part du rédacteur ? Chacun jugera ce que l'on doit penser de la révolution introduite par ledit baron :


 Pour les amateurs de Tintin, je trouve qu'ils ont un air de Dupont et Dupond.

Les Dauphinoiseries de Monsieur Gariel

$
0
0
En ce XIXe siècle avide de découvrir et de mettre en valeur les trésors bibliographiques de nos provinces, un homme, Hyacinthe Gariel, inamovible bibliothécaire de la ville de Grenoble de 1848 à 1882, a voulu apporter sa contribution au dévoilement de trésors bibliographiques et historiques du Dauphiné restés manuscrits.



Il entreprit en janvier 1852 de publier des textes inédits sous le titre inventé par lui de Delphinalia, que l'on pourrait traduire par "du Dauphiné", mais aussi, par Dauphinoiserie. Il s'en explique dans l'introduction :
« Sous le titre Delphinalia, nous commençons la publication d'une série de documents inédits et souvent inconnus, mais tous relatifs à l'ancienne province de Dauphiné. ». Les documents « viendront tour à tour et sans préséance aucune » et seront accompagnées de « quelques notes rapides ». Il termine : « Nous n'avons qu'un but : celui d'arracher à une perte plus ou moins certaine, à un oubli plus ou moins immérité, et de livrer aux amis et aux curieux de nos annales encore à rédiger, un foule de documents perdus dans des collections particulières ou enfouis dans des dépôts publics, où malheureusement si peu de personnes viennent les consulter. »


Cette première série est composée de 5 brochures, formant chacune un tout en soi. Il s'agit de la publication de textes inédits, restés manuscrits et possédés par la bibliothèque municipale de Grenoble. Ils concernent essentiellement l'histoire du Dauphiné aux XVIe et XVIIe siècle. On y trouve de nombreux textes de l'historien du Dauphiné Guy Allard, dont les manuscrits sont entrés à la bibliothèque grâce à Hyacinthe Gariel. Ces textes sont publiés avec de courtes introductions et quelques notes de bas de page. Malgré cela, ils sont livrés au public sans appareil critique, ni mise en perspective vis-à-vis de l'histoire du Dauphiné. Ce sont des matériaux "bruts" à destination des historiens et des amateurs.


Les tirages sont tous différents, mais ils restent faibles, entre 90 et 120 exemplaires, ce qui rend d'autant plus rare la collection complète. Ces brochures ont pour date de publication : janvier 1852, mai 1852, avril 1854, octobre 1855 et septembre 1856. On voit qu'avec le temps, le rythme ralentit fortement. Après cette dernière brochure, Hyacinthe Gariel s'attelle à la publication des manuscrits qui forment la Bibliothèque historique et littéraire du Dauphiné, collection à laquelle appartient le Dictionnaire historique,chronologique, géographique,généalogique, héraldique, juridique,politique et botanographique du Dauphiné, de Guy Allard.

En 1868, Hyacinthe Gariel est l'âme et l'animateur d'une société de quinze bibliophiles dauphinois qui fait paraître la Revue des Bibliophiles dauphinois. Dès le premier numéro, il renoue avec sa volonté de faire paraître de nouveaux textes inédits sur le Dauphiné. Comme il l'annonce lui-même : « Sous ce titre [Delphinalia], que nous avons inventé il y a quelques vingt ans, – trop longtemps hélas ! – nous publierons de petites anecdotes, de petites pièces vers ou prose, historiques, biographiques, philologiques, bibliographiques, anecdotiques, en un mot toutes les dauphinoiseries possibles. Ce sera petit, ce sera menu. Mais il n'y a rien de petit pour qui cherche et qui veut comprendre. »


Le revue disparaît en 1874. Hyacinthe rassemble en un volume tous les documents Delphinalia qu'il a publiés dans la Petite Revue des Bibliophiles dauphinois, dont il a été le maître d'œuvre pendant les 5 années de sa publication de 1869 à 1874. La présentation est la même, jusqu'aux petits dessins humoristiques de Diodore Rahoult représentant des Dauphins dans des scénettes burlesques ou grotesques. Cette page donne une bonne illustration du style des textes et des dessins de Diodore Rahoult :


Malgré l'histoire chaotique de la publication de ces Delphinalia qui s'étale sur plus de 20 ans de 1852 à 1874, il existe quelques exemplaires complets, reliés par des amateurs. C'est un de cela qui vient de rejoindre ma bibliothèque, sous une simple reliure de percaline. Vu la faiblesse des tirages, c'est déjà un "exploit" de voir un tel recueil.


Pour une description complète de cet ouvrage : cliquez-ici.
Voir une notice biographique de Hyacinthe Gariel (1812-1890)

La Meije vue du Chazelet, de Charles Bertier, 1909

$
0
0
Ce petit tableau de Charles Bertier vient de rejoindre ma collection :



C'est une huile sur carton (H : 256 mm, L : 163 mm.), signée en bas à gauche (voir notice détaillée).
 
Ce tableau est intéressant à double titre.

D'abord parce que c'est une représentation de la Meije, par un des maîtres du paysage dauphinois, qui a beaucoup peint les sommets et vallées du Haut-Dauphiné. Charles Bertier (Grenoble 1860 - Grenoble 1924) est un peintre grenoblois, qui a été l'élève de Jean Achard et de l'abbé Guétal.

Ensuite, l'autre intérêt de ce tableau est qu'il a été peint spécialement pour illustrer la couverture d'un recueil de poèmes de son ami Emile Roux-Parassac (1874 - 1940) : Les Poèmes de l'Alpe, Paris; Aurillac, 1910 (voir notice détaillée). Charles Bertier, en le peignant, avait déjà prévu le titre et le nom de l'auteur. La couverture du recueil est la reproduction à l'identique :


Au dos du tableau, se trouve un envoi signé de Charles Bertier à Emile Roux-Parassac :



Quelques éléments sur Charles Bertier :

Pour sa vie, on peut se reporter à cette notice Wikipédia bien complète : Charles Bertier.


 Portrait-charge de Charles Bertier, par E. Tézier,
avec un quatrain d'Emile Roux-Parassac

Deux exemples de ses œuvres :



Ces dernières années, deux tableaux de Charles Bertier représentant la Meije sont passés en vente :



Enfin, deux ouvrages de référence sur ce peintre :


La notice ci-dessous, publiée à l'occasion d'une exposition organisée en 1986 par l'Association pour la Création d'un Musée des Artistes Dauphinois (ACMAD),  contient une biographie complète par son petit-fils et une notice nécrologique chaleureuse par son ami Emile Roux-Parassac :



Enfin, dernier témoignage du lien entre Charles Bertier et Emile Roux-Parassac, cette reproduction d'un tableau de Charles Bertier, incluse dans le recueil de poésies : Souffles d'en haut, d'Emile Roux-Parassac, totalement illustré par des artistes dauphinois.

En Oisans : approche de l'orage, de Charles Bertier

Ce tableau de Charles Bertier, peint vers 1900, obtint un grand succès. Il a été présenté dans plusieurs expositions. Lors de l'incendie de son atelier de la Bajatière, cette oeuvre a  été détruite alors qu'elle venait d'être emballée pour être expédiée à un collectionneur de Seattle (U.S.A.). Cette reproduction dans l'ouvrage d'Emile Roux-Parassac est un des seuls témoignages sur ce tableau aujourd'hui à jamais disparu.

Comme je l'avais déjà fait pour un autre tableau (voir ici, en fin de message), j'ai confié sa restauration (un coin était cassé, avec perte de la couche picturale) et son nettoyage à Adeline Velten : Atelier d'Adeline.

Des Ephemera préservés : le tourisme en Dauphiné.

$
0
0
Le premier Syndicat d'Initiative de France a été créé à Grenoble 1889 pour fédérer et développer les initiatives en faveur du développement du tourisme à Grenoble et dans le Dauphiné. Très vite, il s'est illustré par une grande activité éditoriale en publiant des livrets, des albums, des guides, etc. Il ne possédait cependant pas de périodique à destination de ses membres. C'est ainsi qu'en décembre 1908 paraît le premier numéro d'un bulletin mensuel simplement appelé L'Initiative, distribué gratuitement aux membres du Syndicat.


Il parait sous forme d'un journal de 8 grandes pages, se terminant toujours par une liste : Maisons spécialement recommandées par le Syndicat d'Initiative de Grenoble et du Dauphiné et une page d'annonces commerciales. Comme bulletin de liaison entre ses membres, les premiers numéros donnent la liste complètes des adhérents. On y trouve une majorité de Grenoblois, soit des représentants de la bourgeoisie local intéressés au développement touristique de la ville et de la région, soit des professionnels directement concernés comme les hôteliers ou certains commerçants. En dehors de Grenoble, ce sont surtout des hôteliers de la partie alpine de la région (Oisans, Hautes-Alpes, etc.).


Au-delà de ces pages pratiques, ce bulletin contient surtout des articles directement liés au développement touristique. Cela va d'un histoire du Syndicat et des ses activités par son président Armand Chabrand, jusqu'à des articles très pratiques sur les questions des dessertes par les trains, du développement du réseau télégraphique et téléphonique (comment appeler sa famille le dimanche soir ?) ou l'état et la construction des routes. Il contient aussi les différents comptes-rendus des assembles générales. Pour ouvrir des perspectives à ses membres, il n'hésite pas à aborder la question de l'hôtellerie à New-York ou la création des Parc Nationaux, à l'exemple de ce qui a été fait aux Etats-Unis. D'ailleurs, quelques articles sont consacrés aux premiers développements du futur Parc des Ecrins, par la mise en place d'une zone protégée dans la haute vallée du Vénéon (La Bérarde). Pour finir, il y a même une protestation sur un changement des dates des vacances universitaires, comme pouvant nuire à l'activité touristique (déjà !).


J'ai eu la chance d'acquérir une collection continue et reliée des bulletins de décembre 1908 (1ère année, n°1) à juillet 1914 (6ème année, n° 7), formant 6 années et 58 numéros (en règle générale, il y a 10 numéros par an). La question est : est-ce que la collection est complète ? Évidemment, il n'existe aucune bibliographie pour ce type d'ouvrages très éphémères (et un peu "communs", il faut le dire). Mes recherches dans les différents catalogues de bibliothèques publiques m'ont permis de ne trouver qu'une collection incomplète et disparate à la BNF : 6 numéros, dont le dernier est celui de décembre 1913. Ma collection va au-delà. Est-ce pour cela que l'on peut dire qu'elle est complète ? Je pense que oui car le dernier numéro est celui de juillet 1914. Le suivant aurait dû paraître en septembre (numéro d'août-septembre 1914). Il est probable qu'il n'a jamais paru à cause de la guerre. Remarquons pour finir qu'il n'existe aucun exemplaire dans le Fonds Dauphinois de la Bibliothèque Municipale de Grenoble.

Le Syndicat d'Initiative a publié de très nombreuses brochures à destination des touristes. A titre d'exemple, j'ai une petit plaquette de 24 pages, publiée en 1900 (100.000 exemplaires !) et distribuée gratuitement :
Le Dauphiné. Notice illustrée publiée par le Syndicat d'Initiative de Grenoble et du Dauphiné


La couverture porte une belle reproduction d'un tableau de Pierre Comba.


Cette image donnera un aperçu de la présentation soignée (voir la qualité de la photographie) du contenu :



Pendant que l'on est dans le tourisme, une carte publicitaire pour l'hôtel de la Meije à La Grave (Haute-Alpes), tenu par les frères Juge. Là-aussi, on peut constater la qualité de ce document, éphémère par nature (au passage, on peut noter la qualité de la conservation).




Autant je n'ai rien trouvé sur les bulletins Initiative, autant j'ai trouvé une référence pour ce document. Il est coté sous le n° 277 de l'inventaire de Paul Guillemin La Meije dans l'image. Cela m'a aidé à déchiffrer les deux signatures : E. Tézier, pour le dessinateur et Rougeron-Vignerot, pour le graveur.

Une plaquette pour une belle amitié alpine

$
0
0
En 1888, Katharine Richardson, une anglaise de 34 ans (elle est née à Edlington en Angleterre le 24 avril 1854) fait la première féminine de la Meije. Ce même jour, Mary Paillon (1848-1936), une autre alpiniste, une des pionnières de l'alpinisme au féminin, se trouve à la Grave. Quelques jours plus tard, elles se retrouvent à la Bérarde et de là naît une amitié entre elles qui ne se terminera que par la mort de Katharine Richardson à Oullins, près de Lyon, le 20 août 1927.

A partir de ce moment-là, les deux femmes parcourront les alpes, en enchainant les premières féminines. Elles sauront aussi se faire simples excursionnistes. C'est ainsi qu'en août 1897, elles rejoignent 3 centres d'excursions alpins qui permettent de découvrir le massif des Ecrins par des abords un peu différents. Ce sont le Désert en Valjouffrey, le Clot en Valgaudemar (refuge Xavier Blanc) et Ailefroide, près de Vallouise. Mary Paillon se fait diariste et Katie Richardson se fait peintre et dessinatrice. De l'association des deux naît un texte d'abord paru dans la Revue alpine,dont un tirage à petit nombre a été fait spécialement pour la section de Gap du Club Alpin Français :
Autour de Trois Nouveaux Centres d'Excursions. Pages de la vie alpine.
Lyon, Imprimerie Vve Mougin-Rusand, 1898


C'est une petite plaquette tout simple, mais on peut en faire son bonheur pour la fraîcheur du récit de Mary Paillon qui sait rendre les péripéties minimes de cette excursion. En digne sœur de son frère (Maurice Paillon, rédacteur des guides Joanne), elle sait aussi apprécier les efforts faits pour aménager le massif afin d'en faciliter l'accès aux touristes.Quant aux dessins de Katie Richardson, ils donnent une touche de légèreté au récit comme ce petit croquis d'une chaussure remplie de paille pour la faire sécher. 


A ses heures, Katie Richardson savait aussi être peintre (aquarelliste semble-t-il), comme dans cette représentation de l'Olan (le style en est peut-être un peu plus lourd) :



Si l'on veut découvrir Mary Paillon et Katie Richardson, rien de mieux que de lire le beau texte que leur a consacré Micheline Morin dans un des premiers essais consacrés à l'alpinisme au féminin : Encordées, paru en 1936. Pour lire ce texte, cliquez-ici.


Témoignage de leur amitié, elles se rendent toutes les deux à la mairie d'Oullins le 21 octobre 1911 pour déclarer le décès de Jane Paillon, la mère de Marie et Maurice Paillon. Leurs signatures se trouvent côte-à-côte dans le registre



Un autre attrait de cette plaquette est qu'elle a été donnée par Mary Paillon au révérend Coolidge (1850-1926), un américain qui a été un des pionnniers de l'alpinisme de l'âge d'or. En particulier, il fut un des artisans de la découverte et de l'exploration du massif des Ecrins dans lequel il a enchaîné les premières. Au début, il était accompagné de sa tante Miss Brevoort et de sa chienne Tschingel !

Il a apporté quelques corrections manuscrites au texte de Mary Paillon.

Cette photo traditionnelle de Coolidge au temps de ses exploits :



peut être complétée par celle-ci, où on le voit âgé. On devine son côté "ronchon" qui le fera se chamailler avec beaucoup de ses contemporains sur des points d'érudition alpine (il se voulait le spécialiste incontestable de l'histoire alpine...).



Pour finir ce message, je ne peux m'empêcher de mettre en rapport ce dessin de Katie Richardson représentant la refuge Xavier Blanc dans le Valgaudemar :


 avec cette photo prise l'année dernière lors d'un séjour dans cette vallée.



Pour finir, une belle vue de l'Olan et du lac des Pétarels dans le Valgaudemar, souvenir des vacances de l'année dernière, toujours dans le Valgaudemar.



Jean Jacques Rousseau à Grenoble (bis)

$
0
0
Il y a quelques mois, je présentais une plaquette d'Auguste Ducoin sur le (court) séjour de Jean-Jacques Rousseau à Grenoble en 1768 (voir ici). Au passage, c'est un des messages parmi les plus lus. Ce travail était fondé sur un mémoire manuscrit de l'avocat Bovier qui avait accueilli Rousseau à Grenoble et l'avait accompagné tout au long de son séjour, jusqu'au point de l'importuner. Rousseau lui fera un sort en le tournant en dérision, nominativement, dans un passage des Lettres d'un promeneur solitaire. Il l'a pas moins accusé de l'avoir laissé prendre le risque de s'empoisonner avec des baies sur les bords du Drac.

En cette année du tricentenaire, les Presses Universitaires de Grenoble (PUF) ont eu la bonne idée de publier à nouveau ce document, en respectant les règles modernes de la publication des textes manuscrits. L'ouvrage, bien illustré, est présenté et annoté par Catherine Cœuré et Jean Sgard.


Les règles modernes de publication impliquent au moins la fidélité au texte original. C'est ainsi que j'ai découvert que le texte publié par A. Ducoin en 1854 n'était qu'une paraphrase du mémoire de l'avocat Bovier, paraphrase qui était parfois accompagnée de commentaires, voire de jugements de valeur sur ce "pauvre" Bovier. En effet, après avoir été ridiculisé par J.-J. Rousseau, il se voyait mal servi par son compatriote. La comparaison de ces deux extraits permettra de comprendre mon propos.

Le texte original, tel que donné par l'édition des PUG (p. 30) :

Pour éviter un détour dans les appartements des domestiques et la cuisine, je le conduisis par mon cabinet qui était contigu à l'escalier. En y entrant et voyant une bibliothèque assez considérable, trop peut-être pour un idiot de ma sorte, il fronça le sourcil et me dit d'un ton assez ironique : « Il y a ici bien des mensonges ! » - « Il y a encore plus de belles et bonnes vérités, monsieur, lui repartis-je, je vous montrerai Emile qui me guide ainsi que vous allez le voir, le Contrat social que j'étudie, La Nouvelle Héloïse qui me transporte, plusieurs discours de Jean-Jacques Rousseau et d autres auteurs qui m'instruisent et m'amusent. »
Il balbutia quelques mots et, continuant sa route en donnant la main à la belle nourrice.

La version d'Auguste Ducoin (pp. 19-20) :

On traverse un cabinet occupé par la bibliothèque de Bovier.
- Il y a ici bien des mensonges, dit Jean-Jacques, en donnant cours à ses pensées favorites, aussitôt qu'il apercevait un volume, ou la moindre feuille imprimée.
- On y trouve plus encore de belles et bonnes vérités, s'écrie l'avocat, à l'affût d'une occasion favorable pour glisser un compliment. Voyez l'Emile, qui est mon guide, le Contrat social que j'étudie et la Nouvelle Héloïse qui me ravit d'admiration !
A ce coup d'encensoir où fumait un parfum trop grossier pour son orgueil délicat et raffiné, Jean-Jacques rougit, balbutie quelques mots et s'empresse de gagner une petite cour.

Cela m'amène d'ailleurs à revoir ce que j'avais pu écrire sur l'ouvrage d'Auguste Ducoin que je tenais pour un travail de qualité.

Je recommande donc cet ouvrage. Je n'aurais qu'un seul regret à exprimer. A trop vouloir défendre la mémoire de Jean-Jacques Rousseau, fallait-il charger la mémoire de ce "pauvre" avocat Bovier qui, non seulement a été accusé de laisser Rousseau s'empoisonner, mais passe maintenant pour un "notable prétentieux, mais un peu naïf". Preuve, s'il en ait, que la passion que provoque Rousseau n'est toujours pas éteinte au point qu'il y a toujours des personnes pour le défendre même dans les travers de sa personnalité ou de son comportement quotidien. Pourtant, cela n'a pas de rapport direct avec sa pensée, qui, seule aujourd'hui, devrait faire l'objet de débat.

Découverte de Turin, ses musées, ses libraires (ceux qui étaient ouverts !)

$
0
0
J'ai profité de ces dernières vacances pour faire une petite virée en Italie. Cela faisait longtemps que je voulais découvrir le musée de l'Alpinisme et de la Montagne de Turin.

Le musée de la Montagne, de Turin

Première remarque : pour tous ceux qui s'intéressent à la montagne, ce musée me semble indispensable, beaucoup plus que son équivalent chamoniard. Il est de plus installé dans un site magnifique qui domine Turin. On peut imaginer que le panorama des montagnes qui entourent Turin est superbe, mais la brume de chaleur n'en laissait deviner que le contour.

Vue de Turin depuis Superga

Cela a aussi été l'occasion de découvrir Turin. Avant de partir, j'avais consciencieusement relevé les adresses des différents libraires anciens, en particulier celle d'un libraire qui, il y a quelques années, avait proposé un catalogue magnifique, plein de raretés sur les Alpes et la montagne. Las ! les libraires s'étaient visiblement donnés le mot, ils étaient quasiment tous en vacances. J'ai pu tout de même en voir un, plus vendeur de cartes et d'estampes que de livres anciens. Pour ne pas partir bredouille, j'ai acheté cette carte du Mont-Thabor et de ses environs.


Cette carte est extraite de : 
Opérations géodésiques et astronomiques pour la mesure d'un arc du parallèle moyen exécutées en Piémont et en Savoie, par une commission composée d'officiers de l'état major général et d'astronomes piémontais et autrichiens en 1821, 1822, 1823
Milan, Imprimerie impériale et royale, 2 volumes, 1825 et 1827.



Dans ce travail de géodésie, un certain nombre de sommets ont servi de repère géodésique. Parmi eux, le Mont-Thabor, à la frontière actuelle des Hautes-Alpes et de la Savoie (altitude : 3.178 m.). L'ouvrage contient un chapitre spécial consacré à la description des différents sommets : Chapitre second. Description des stations géodésiques avec la topographie de leurs environs. Chaque description de sommet est accompagnée d'une carte. La description du Mont Thabor (orthographe moderne) est la suivante :

Mont-Tabor (élevé de 3.172 mètres au-dessus du niveau de la mer)
Le Mont-Tabor est situé au sud-est du village du St Michel en Maurienne, près des confins qui séparent la Savoie et le Piémont du Dauphiné. Il se trouve à la tête des vallons de Valmeinier du côté de la Savoie, et de Mélezet du côté de Bardonêche. Le sommet de la montagne est un plateau assez étendu, qu'on ne peut aborder sans traverser les glaciers qui l'entourent. On y arrive, soit en remontant la droite du vallon de Valmeinier, soit en suivant celui de Mélezet, et enfin, en partant de Modane, par le vallon de la Rou, et passant à la chapelle de N. D. de Charmais, pour prendre ensuite l'embranchement à droite, et laisser à gauche le chemin de Bardonêche. Il est éloigné de sept heures et demie de marche de St Michel, de cinq heures de Mélezet, et de six heures de Modane. 
Le signal est placé sur le bord des escarpemens qui regardent la tête et les lacs du vallon de Valmeinier, à deux cents pas de la chapelle qui se trouve à l'extrémité du plateau. On aurait choisi de préférence le point culminant, si la vue du Perron des Encombres n'avait été masquée par le Pic qui s'élève du milieu du glacier vers l'ouest. Le signal est bâti en pierre sèche, et a la même forme que le précédent. 

J'ai eu d'autant plus de plaisir a acheté cette carte que je suis monté au sommet du Mont-Thabor cet été. La chapelle dont parle le rédacteur de l'ouvrage ci-dessus existe toujours, comme le prouve cette vue.



En revanche, les glaciers, qui étaient sûrement très développés en cette fin de petit âge glaciaire, ne sont plus qu'un souvenir. Tout au plus reste-t-il quelques névés. En revanche, la vue est toujours aussi belle, comme le prouve ce panorama du massif des Ecrins.


Avec ce détail sur le massif de la Meije :

Une conférence lors des journées du patrimoine 2012

$
0
0
"Les trésors cachés de la bibliographie briançonnaise", tel est le titre de la conférence que je vais prononcer vendredi et samedi prochains dans le cadre des Journées du Patrimoine 2012. Pourquoi un tel titre ? L'annonce est déjà un premier élément de réponse :
Le livre, un patrimoine caché ? On croit connaître tout ce qui a été écrit sur le Briançonnais. Et pourtant, dans cette masse impressionnante de plusieurs centaines d'ouvrages, il se cache quelques trésors, quelques « pépites ».
Qui saurait dire que, dans tel ouvrage au titre improbable, se cache le premier mémoire historique sur le Briançonnais ? Que telle plaquette de souvenirs nous fait revivre une première communion au début du xixesiècle ? Qu'un sous-préfet de Briançon s'est fait l'ardent défenseur du fouriérisme et de son introduction dans nos Alpes ? Qu'un savant anglais aujourd'hui oublié a, pour la première fois, dessiné nos sommets du Haut-Dauphiné ? Qu'un notable du premier Empire a raconté son séjour forcé dans le Queyras sous la Révolution ?
Ce sont ces livres, et quelques autres, que le conférencier invite à découvrir à travers un parcours guidé parmi près de mille ouvrages depuis le début du xviie siècle jusqu'au milieu du siècle dernier.
De plus le thème des journées 2012 est le patrimoine caché. Donc, si vous voulez en savoir plus, je vous invite :
  • Gap - Vendredi 14 septembre – 18 h 30 – salle Le Royal, rue Pasteur
  • Briançon – samedi 15 septembre – 16 heures – ancienne salle d’audience du Tribunal – 49 Grande Rue
Ces conférences sont prononcées sous les auspices de la Société d'Etudes des Hautes-Alpes.
Pour donner un indice sur le sous-préfet fouriériste,  son ouvrage majeur est illustré de cette planche :


Ne m'imaginez pas comme ce vénérable vieillard sous mon arbre, éclairant mes auditeurs sur la bibliographie briançonnaise.



Un anniversaire et une conférence

$
0
0
Hasard du calendrier, hier 15 septembre j'ai fêté les 5 ans de ce blog et j'ai prononcé une conférence visiblement appréciée sur les trésors cachés de la bibliographie briançonnaise, dans l'ancienne salle d'audience du tribunal de Briançon (cette conférence avait été prononcée la veille à Gap).

Je vois comme un signe dans le rapprochement de ces deux événements car le travail mené patiemment sur ce blog et sur le site qui lui correspond (www.bibliotheque-dauphinoise.com) trouve sa concrétisation dans une conférence comme celle d'hier. Le savoir accumulé à travers les livres et ordonné grâce la publication sur Internet a pu ainsi, à travers un thème choisi, être partagé. J'ai abordé cette conférence comme un essai de synthèse sur comment un petite région française, le Briançonnais, riche en histoire et en beautés naturelles, a été découverte, explorée, racontée, décrite, illustrée par le livre.

Quelques uns des livres et des illustrations qui ont été présentés :

Vue de Briançon, dans Les vallées Vaudoises pittoresques, William Beattie,1838

 Jean Pierre Cot, un ouvrier boulanger, défend l'emplacement de la gare de Briançon, en 1876

 Château-Queyras, dans l'Album du Dauphiné, 1835-1839

 Des récits d'ascensions par Paul Guillemin, 1880

 Une gravure (glacier blanc, glacier noir, les Ecrins) d'après une photo de Paul Guillemin

 Un roman inoubliable (!), qui débute dans le Briançonnais

Le premier mémoire historique sur le Briançonnais, en 1754, par Jean Brunet 
et sa reliure

Le sage sous-préfet Chaix et ses pensées fouriéristes 
dans ses Préoccupations, etc. parues en 1845.

Les belles illustrations de costumes briançonnais dans cet ouvrage d'Edmond Delaye



Le Pays Briançonnais, d'Henri Ferrand, un beau livre de photos

Un exemple d'ouvrage d'un promeneur du dimanche...

Lorsque un ancien préfet se fait romancier...


Un livre d'érudition entièrement autographié

Le Briançonnais vu par les militaires 
et sa reliure

La présentation complète (sans le discours qui l'accompagne !) peut être téléchargée ici : cliquez-ici.

Joanny Drevet, l'Ecole Estienne et autres

$
0
0
J'ai récemment eu l'occasion d'évoquer l'illustrateur Joanny Drevet, qui a mis son talent au service des paysages des Alpes dauphinoises (voir ici). En 1930, il collabore à une belle entreprise éditoriale, peut-être un de ses premiers livres illustrés. Sur la base de 4 nouvelles de Pierre Scize (pseudonyme du journaliste lyonnais Michel Piot, 1894-1956), les éditions Didier & Richard de Grenoble publient un bel ouvrage, aux nombreux grands papiers, en faisant appel à Joanny Drevet pour l'illustration. 


Tout cela donne ce livre En Altitude, tiré à 2150 exemplaires, illustré de 16 eaux-fortes et 12 héliogravures de Joanny Drevet. En supplément, 5 petits dessins à la plume font office de culs-de-lampe.

Pour parler rapidement des nouvelles, il suffit de dire que ce sont 4 récits tous localisés dans les Alpes dauphinoises (Oisans, Queyras,...), dans lequel l'auteur cherche à évoquer les hommes (habitants, alpinistes, etc.) dans leurs rapports et leur confrontation avec la montagne et son monde. Le ton est un mélange, un peu vieilli, de fantastique et de nostalgie d'un monde en train de disparaître.

Pour revenir à Joanny Drevet, ces quelques illustrations extraites du livre donneront un perçu de son talent comme aquafortiste ou comme dessinateur, tout simplement.










Quelques années plus tard, en 1933, Pierre Scize donne une deuxième édition non illustrée, sous le titre Gens des Cimes, complétée d'une nouvelle et d'un Avertissement, qui est un réquisitoire contre le progrès et les dégâts irréparables qu'il occasionne au monde de la montagne.

En 1937, peut-être comme résultat de leurs travaux pratiques, les élèves de l'Ecole Estienne s'attellent à une nouvelle édition, qu'ils composent, impriment et illustrent eux-mêmes. 



Cela donne un bel ouvrage in-folio en feuilles, tiré à seulement 200 exemplaires, illustré de 11 gravures, dont je donne ici quelques exemples.







Ces gravures sont manifestement inspirées de photographies de l'époque et ne sont pas des représentations des paysages qui forment le cadre des nouvelles du recueil.

La dernière gravure en colophon illustre la justification du tirage  :


Il semble que l'édition d'ouvrages par les élèves de l'école Estienne ait été courant dans les années qui ont précédé la guerre. Cette même année 1937, ils ont aussi édité 3 autres ouvrages.

Pour finir, dernière édition, à Lyon, au sortir de la guerre, en 1945. L'illustrateur est alors Jean-Albert Carlotti, peintre lyonnais (1909-2002). 
 

Le tirage est plus important, 2020 exemplaires. Les illustrations, très noires, renforcent le ton légèrement pessimiste des nouvelles en leur donnant une tonalité plus sombre. D'un certain point de vue, elles sont plus proches du contenu des nouvelles, car elles s'attachent plus à représenter les gens, qui forment le cœur de chaque nouvelle, que les paysages qui ne sont souvent qu'un cadre rapidement évoqué. Ce choix donne un aperçu du style et du ton général de l'ouvrage :





Pour aller plus loin et voir d'autres illustrations des ouvrages, rendez-vous sur mon site :
En altitude, 1930, illustré par Joanny Drevet
Gens des Cimes, 1937, illustré par les éléves de l'Ecole Estienne
Gens des Cimes, 1945, illustré par Jean-Albert Carlotti

Pour finir, une précision pour mes lecteurs lyonnais, c'est le quai Pierre-Scize qui a donné son nom au journaliste et non l'inverse...
Viewing all 169 articles
Browse latest View live